Conny Schneider : « Inutile de mixer les musiques africaines pour les rendre plus accessibles »
Cette semaine, Conny Schneider était dans les locaux de Music In Africa à Dakar (Sénégal). La musicienne aux origines allemandes n’a certes pas proposé un de ces renversants spectacles dont elle a le secret, mais elle a abordé des points intéressants, dans un entretien avec notre équipe.
Bonjour Conny, pourrais-tu te présenter à nos lecteurs et parler un peu de ta passion pour la musique ?
Bonjour, je suis Conny Schneider, saxophoniste et trapéziste d'origine allemande. Je suis installée au Sénégal depuis trois ans et depuis un an j'évolue avec le groupe Gestu qui est un projet que j’ai moi-même initié avec quelques amis. Nous avons organisé plusieurs spectacles au Goethe Institut, au Djoloff et à l’Institut Français de Dakar. Nous avons eu l'opportunité également de nous produire aussi au Saint-Louis Jazz Festival, qui est un rendez-vous incontournable pour les amoureux du jazz. Nous enregistrons présentement un album, qui est en phase de mixage et de mastering.
J'adore effectivement le jazz, mais je suis très ouverte aux autres styles musicaux. J’écoute aussi de la pop, du rock, des musiques traditionnelles de plusieurs pays et même si je n’ai pas d’idole ou d’icône en musique, j’ai un faible pour beaucoup d’artistes, notamment la chanteuse Liz Wright qui dégage toujours une grande sensibilité quand elle chante.
Tu as récemment aussi joué à l’Émoi du jazz d’Abidjan, pourrais-tu nous en dire quelques mots ?
Oui j’ai joué à Abidjan à la dernière édition du Festival Émoi du Jazz. Le spectacle mêlait trapèze, saxophone et guitare. Je garde un excellent souvenir de ce séjour en Côte d’Ivoire. Le public était très chaleureux, le comité d’organisation du festival formidable et la ville d’Abidjan elle-même très accueillante.
Pourrais-tu nous parler un peu de ton processus de création artistique ?
Je mise beaucoup sur la spontanéité et l’instantanéité. J’aime me lever, sans la moindre raison, prendre mon saxophone ou un piano et écrire des mélodies qui me viennent à l’esprit. Je prends ensuite beaucoup de temps, des mois parfois, à les retravailler et à les arranger.
Quelquefois, une émotion ou un état d’âme peut être la source d’inspiration de ma musique.
Tes oeuvres sont-elles engagées pour la cause des femmes dans le secteur musical ?
Ma musique qui est essentiellement instrumentale et très englobante, n’est pas faite de mots mais uniquement de sons. C’est donc très difficile dans ce genre, de véhiculer un message pour la promotion de la femme.
Par contre, j’admets que les femmes sont encore un peu exclues du milieu musical, c’est pour cela que nous sommes peu nombreuses dans ce secteur. Le droit pour les femmes de pratiquer et de vivre de la musique, je ne le revendique pas à travers mes œuvres, mais dans mon vécu d’artiste que je voudrais inspirant pour d’autres femmes.
Que penses-tu de la place du Jazz en Afrique ?
Il y a d’excellents musiciens de jazz en Afrique, mais il n’y a pas un grand public pour ce genre musical. Quand il y a des spectacles de jazz, les gens s’en approchent et s’intéressent tout de suite, mais c’est comme s’ils découvrent à peine.
Je pense que les médias (radios et télévisions) devraient d’avantage promouvoir ce style musical et aider à le rendre populaire. Du fait de ses origines africaines, c’est un style qui, promu, devrait intéresser de nombreuses personnes sur le continent africain.
Les musiques africaines sont de plus en plus populaires à travers le monde. Quelle impression cela te laisse ? Que faudrait-il faire selon toi, pour les ouvrir à une audience encore plus large ?
Pour moi, la diversité musicale est une des richesses du globe. De chaque pays et de chaque continent émanent des mélodies, pour le plus grand plaisir des mélomanes. Cela me plaît énormément de voir que les musiques africaines participent elles aussi de cette dynamique et qu’elles sont appréciées sur toute l’étendue du monde.
Je pense qu’il serait inutile de vouloir les mixer à d’autres genres pour prétendument les rendre plus accessibles, comme certains choisissent de faire. Ces musiques sont appréciées pour ce qu’elles sont et pour leur authenticité. Il faudrait juste mettre en place un système plus efficient de distribution, pour que l’Afrique soit d’avantage écouté ailleurs.
Aurais-tu un conseil à délivrer aux artistes de l’Afrique qui te lisent ?
Juste les inviter à prendre un peu plus d’initiatives. Beaucoup se plaignent du fait que les choses stagnent dans leurs carrières, hélas ils n’essaient rien. Ils ne développent pas de nouveaux concepts et finalement ils taisent leur créativité, là où un artiste devrait toujours chercher à innover.
Un petit mot pour la fin ?
Oui, à tous les mélomanes, retrouvez-moi le 11 août avec le Gestu Groupe au Goethe Institut de Dakar ! Je remercie aussi Music in Africa pour ses actions panafricaines, qui mériteraient d’être d’avantage mises en lumières. Dommage, je ne serai pas cette année à la conférence ACCES qu’organise la Fondation, mais je m’y rendrai l’an prochain.
Propos reccueillis par Lamine BA et Jean de Dieu Boukanga
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